Pour aller
encore plus loin dans l’aventure, ils ont donc décidé de faire appel à l’œnologue
Pascal Chatonnet, fondateur du laboratoire Excell. C’est ce chercheur qui a
élaboré le vin du futur.
Plantons le décor d’abord. Nous sommes en
2050. Le dérèglement climatique est plus que jamais une réalité. Les
conséquences sont fatales : les vignobles du centre de l’Espagne et de l’Aquitaine
sont sur le point de disparaître si ce n’est déjà le cas. La carte présentée
par Yves Leers parle d’elle-même : d’ici 70 ans les vignes
pourraient se décaler de 1000 kilomètres au nord de leur limite traditionnelle. 1000
kilomètres au nord en diagonale, on se retrouve en Allemagne. En Angleterre, d’ores
et déjà les viticulteurs font un très bon champagne.
L’impact du réchauffement sur le vignoble est multiple. Avec une augmentation
de 2 à 4 degrés, l’arôme est appauvri et le goût trop mûr. Les périodes de
sécheresse modifient le goût qui devient plus sec et amer. Sans oublier la grêle
et les inondations qui gâchent le fruit. Ces 5 dernières années, Bordeaux a
connu 3 périodes de sécheresse. Déduisez-en ce que vous voulez.
Cela n’augure rien de bon pour notre Bordeaux de 2050. Pour le réaliser, Pascal Chatonnet a assemblé les 2 cépages traditionnels de la région, le merlot
et le cabernet sauvignon mais sous des latitudes plus au sud, anguedoc-Roussillon et même Tunisie. Un
climat plus chaud et plus sec. Vous me direz que le terroir n’est pas le même.
C’est un fait mais globalement nous avons avec ce vin un avant-goût amer de l’avenir.
Il est très différent du profil original. Un Bordeaux méconnaissable.
Je ne serai pas trop technique car je
ne suis pas experte. Rien qu’à la couleur, il n’a plus rien d’un Bordeaux. Ce
sont presque des couleurs de Gamay. Il faut dire que les pigments sont modifiés
par la chaleur. De la même façon, le vin est fruité, des fruits rouges mais
plutôt cuits. Rien de très frais. Quand vous le mettez en bouche, vous avez d’abord
une sensation onctueuse, presque sucrée mais qui disparaît vite car les tannins
prennent le dessus. Une astringence qui vient du merlot…stressé. Le pauvre! En
résumé le vin est moins fin et moins élégant. Par ailleurs il ne vieillira pas
bien. Pour le moment, certains viticulteurs de la région sont contents. Ils ont
élaboré de bons vins après des étés chauds. La cuvée 2016 est remarquable. Mais
attention, quand il fait trop chaud cela ne marche plus.
Comment faire alors ? Il est temps de réfléchir à d’autres méthodes.
Certains réalisent des tests notamment avec des cépages portugais. Mais les cadres
restent très rigides. Comme le rappelle Pascal Chatonnet, les trois maîtres-mots en matière de vinification sont « loyal,local et constant mais ne n’oublions
pas, rien n'est constant. » Amateurs de bon vin, est-ce que je vous ai
fait peur ? Le vin est notre patrimoine. S’il est atteint, il ne sera pas
le seul. Comme le dit Yves Leers : « tant de choses sont à notre
portée mais il en est une plus simple que les autres : se convaincre la
réalité du changement climatique »
Je n’aurai donc qu’un mot : Santé !