vendredi 26 août 2016

Qu'est-ce qu'on attend? Ou la culture du paradoxe

 

Me voilà donc de retour parmi vous après un été très riche. J'espère que vous avez la même pêche que moi. La Rochelle est décidément une belle ville où il fait bon vivre une Université d'été. Le PS n'a pas renouvelé l'aventure, ils doivent être nombreux à le regretter. Heureusement les experts de la transition énergétique restent très présents dans cet endroit magique. Et je dois dire que cela arrange bien mes affaires. J'ai donc eu la chance de participer aux deux journées de l'Université d'été de la Fondation E5T qui porte un ensemble de réflexions sur la transition énergétique. C'est déjà la 4ème édition Une belle invitation que je ne regrette pas du tout. Nous étions 400 convaincus par la nécessité d'agir. Cela donne du baume au cœur surtout quelques mois après la Cop 21. Et pourtant, parce que l'humain est ce qu'il est , nous cultivons des paradoxes. C'est ce qui est ressorti des débats.

D'emblée Myriam Maestroni, présidente de la fondation E5T a planté le décor: 2016 bat pour la 3ème année consécutive des records de hausse des températuresJe pense que les Parisiens ne vont pas dire le contraire aujourd'hui. La concentration de CO2 n'a jamais été aussi élevée. Et pourtant nos Etats continuent de subventionner à tour de bras les énergies fossiles. Il y a trop de dissensions entre les pays sur les efforts à faire. Aucun prix n'a été fixé au carbone. Christian de Perthuis professeur associé d'économie à Paris Dauphine a évidemment abondé dans ce sens. Selon lui, si l'on veut résoudre la question climatique, on doit inclure dans le coût de production une évaluation des dommages climatiques. L'idée fait timidement son chemin, Ségolène Royal en parle mais on est loin du compte. Et pourtant le temps presse pour l'humanité.


Étonnamment, comme nous ne sommes pas à un paradoxe près, les questions anthropologiques sont très peu présentes dans le débat. C'est Pascal Picq paléoanthropologue que l'on ne présente plus qui s'en étonne. Et pourtant, comme il le dit, nous avons tous une origine commune et sommes tous engagés dans une trajectoire qui va poser des problèmes pour l' humanité. Qui en pose déjà. Il suffit de voir ce qui se passe autour de nous: inondations, sécheresse, incendies..."Il ne se passe pas un jour sans phénomène climatique et pourtant nous avons l'impression qu'il y a plus important". Corinne Lepage ancienne ministre, présidente de Cap 21 le regrette. Et de dire sans détour: "nous avons besoin d'un choix politique fort et de cohérence. " Thomas Porcher docteur en économie à Paris Sorbonne renchérit: "il y a un consensus scientifique, les technologies sont là, nous savons tous que nous devons agir et pourtant il semble que nous aurions besoin d'un marché pour valider notre comportement." Le prix du carbone ne résoudra sûrement pas tout. "Il va falloir passer d'une vision court terme à une vision long terme. "

Alors pourquoi ceux qui nous gouvernent ne bougent-il pas? Je pense avoir trouver une petite réponse. C'est Christophe Bonnery président de l'association des Économistes de l'énergie qui me l'a soufflée. Tout est encore une question d'argent. Nous avons les outils pour changer de braquet mais les investissements seront lourds, très lourds.

D'après une étude de l'OCDE, pour répondre à la demande en énergie, il faudrait encore investir 200 milliards d'euros dans les énergies fossiles et 350 milliards dans le nucléaire. De leur côté, les énergies renouvelables représenteraient des investissements de 1500 milliard d 'euros. Les chiffres parlent d eux mêmes. Si nous voulons décarboner notre économie, il faut donc investir beaucoup et rapidement. En ces temps de crise cela s'annonce bien complexe. Je le sens, je vous ai tous déprimés. J'avoue que je me suis mise à me poser beaucoup de questions. Il ne faut pas se voiler la face. Heureusement les heures suivantes ont été passionnantes et enthousiasmantes: des transports plus doux, de l'habitat durable, de l'agro-agriculture, tous les secteurs s'engagent et innovent. Les entrepreneurs et les enseignants se sont succédés à la tribune de l'université. Je ne peux tout vous résumer mais j'avais envie de mettre en avant certaines innovations très parlantes.

Il y en a évidemment que je connaissais déjà. Comme McPhy. Derrière ce nom aux consonances anglo-saxonnes, une entreprise bien française qui fait avancer le stockage. Son secret: une connaissance parfaite de l'hydrogène. La voiture électrique peut vous emmener plus loin, plus longtemps grâce au prolongateur d'autonomie à hydrogène. Cet hydrogène peut aussi être injecté dans les réseaux de gaz naturel. Il permet d'équilibrer et d'optimiser les réseaux d énergie.

Il a été beaucoup été question d'auto-consommation avec tout d'abord Comwatt. Grégory Lamotte son fondateur est un convaincu: il rappelle que le solaire est l'énergie la moins chère dans le monde. Il est possible, d'après lui, d avoir un mix énergétique renouvelable moins cher dès maintenant. Comwatt qui a d'ailleurs reçu l'un des Trophées E5T de l'innovation territoriale propose donc de piloter automatiquement l'ensemble de vos appareils en synchronisant l offre et la demande. On peut ainsi faire marcher son cumulus quand l'énergie solaire est à son maximum.

Autre moyen d'auto-consommer: l'Arbre à vent. Esthétiquement, il est magnifique. Sur l'écran derrière Jérôme Michel Lariviere Pdg de NewWind, tous les participants braquaient des yeux d'enfants. Son coût est encore élevé donc il est plus adapté aux collectivités qu'à un particulier. Cet arbre compte plus de 60 feuilles qui captent les turbulences de nos villes. Il suffit d'un vent de 7 km/h. Il permet d'alimenter une quinzaine de lampadaires ou encore 70 places de parking... J'avoue aussi avoir fait des découvertes. C est le cas avec le méthanol présenté par Philippe Boulanger chargé des opérations européennes de Carbon Recycling International. Il s'agit de recycler du dioxyde de carbone pour produire ce nouveau carburant. Les usines permettent un bel approvisionnement. Selon Philippe Boulanger, ce méthanol serait mieux que l'essence. Certes on le critique souvent en disant qu'il est toxique car on ne peut pas le boire. Avouons-le, un bon verre d'essence passe mal aussi... Une première usine a vu le jour en Islande.

Ces entrepreneurs m'ont redonné la pêche. Vous pouvez d'ailleurs voir toutes ces interventions si vous le souhaitez. J'ai plus que jamais envie de mettre en lumière leurs démarches. Plus les citoyens seront informés et engagés, plus ils pousseront nos dirigeants à bouger. Il faut l'espérer. J'ai donc envie de citer la phrase slogan de cette université E5T " If you can dream it, you can do it." Elle vient du grand philosophe Walt Disney , comme le dit avec humour Myriam Maestroni. Mais j'ajouterai pour la parapher qu'il ne s'agit plus de rêver, il faut maintenant agir. Je suis donc repartie avec des fourmis dans les jambes. La Cop 22 se profile à l'horizon. Oublions nos paradoxes et les blablas . Dans quelques temps il sera bien trop tard.

mardi 26 juillet 2016

L'ennemi est ailleurs

 
De retour de quelques jours de congés, j'ai fait le tour ce matin d'un kiosque à journaux. Les titres n'ont rien d'attrayant. Les photos de la tragédie de Nice s'étalent sous nos yeux. Une question en Une sur fond blanc:comment vivre avec la peur? A chaque jour son lot d'horreurs entre machette et coups de couteau. Au Moyen-Age, personne ne savait rien de ce qui se passait à plus de 3 kilomètres à la ronde et franchement on ne se portait pas plus mal. Vous me direz que je n'y étais pas mais je le suppose. A force de valoriser les drames, nous nous replions dans notre cocon et les extrémismes montent. Daesh est le symbole de la fin d'un système. Les limites sont atteintes. Notre modèle de société doit évoluer. J'ai envie de prendre du recul comme souvent quand nous revenons de vacances plus sereins, avec l'envie de mettre les pendules à l'heure. Je ne minimiserai pas les horreurs qu'ont vécu les familles des victimes des attentats. Comment continuer à vivre sans comprendre pourquoi ?


Mais pendant que nos esprits se focalisent-à juste titre-sur cet ennemi islamique, nous ne voyons plus qu'une bien plus grande tragédie se joue qui ne fera qu'accentuer les phénomènes dont je parlais. Il y a quelques jours dans les colonnes de Libération ,le climatologue Jean Jouzel, ancien vice-président du groupe scientifique du Groupement intergouvernemental d’experts sur le climat , le Giec, disait: «La rapidité du réchauffement actuel, en moyenne globale, n’a pas connu d’équivalent depuis au moins 8 000 ans […] et il est possible qu’elle n’ait pas d’équivalent à l’échelle géologique»,

Le mois de juin a été le plus chaud jamais enregistré sur la planète depuis le début des relevés de températures, en 1880. N'en déplaise à ceux qui ont vécu dans la grisaille ou sous les trombes d'eau parisiennes. Juin a été le quatorzième mois consécutif durant lequel un record mensuel de chaleur a été battu. C'est la plus longue période continue de montée des températures globales en 137 ans. Et si vous bronzez en me lisant-ce qui est fort peu probable,je l'avoue- sachez que le premier semestre de 2016 a été de loin le plus chaud relevé dans les annales. Une température moyenne 1,3°C plus élevée qu’à la fin du 19ème siècle, selon la Nasa. Votre pastis sera vite rafraîchi car la banquise fond de façon tout à fait inattendue.
Si le sort des ours polaires vous laisse de glace, peut-être que celui de votre portefeuille va vous faire réagir.

Après Jean-Jouzel, c'est le chercheur Tord Kjellstrom du Health and Environment International Trust de Nouvelle-Zélande qui s'inquiète en ce mois de juillet pour notre avenir économique. L'idée n'est pas neuve mais il est toujours bon de la rappeler. Il prévoit que la hausse des températures va engendrer une perte de productivité au niveau national. En Asie du Sud, 20% d'heures de travail annuelles auraient ainsi été perdues pour les emplois les plus exposés aux fortes chaleurs. Selon lui, le besoin de se reposer en période de forte chaleur "deviendra un problème majeur " en particulier pour les ouvriers et les agriculteurs qui travaillent le plus souvent en extérieur.  .
Au total, il estime que 43 pays verront leur PIB diminuer Jusqu’à -6% de produit intérieur brut (PIB) en Thaïlande et en Indonésie, -3,2% en Inde, -0,8% en Chine. Ce n'est pas tout. L'auteur de cette étude chiffre aussi le nombre de décès liés aux catastrophes naturelles survenues depuis 36 ans. Entre 1980 et 2012, il a recensé 21.000 catastrophes - cyclones, inondations et glissements de terrain . Elles ont provoqué la mort de 2,1 millions de personnes. Notre pire ennemi.

La guerre est donc ouverte et il va bel et bien falloir s'unir. Autant le dire, la Cop 21 c'était bien joli et prometteur mais nous savons déjà que l'accord conclu ne suffit pas. Jean Jouzel nous le rappelle. Selon lui, limiter le réchauffement à long terme à 2°C par rapport au niveau préindustriel «requiert d’aller bien au-delà» des engagements de baisse des émissions de gaz à effet de serre pris en décembre . Il faudra «au minimum les doubler d’ici à 2030, puis poursuivre de façon à atteindre la neutralité carbone dans la seconde partie du siècle, avec la nécessité "d’émissions négatives" d’ici à 2100». Préserver notre humanité va exiger un vrai combat. Reste à espèrer que nous saurons lequel mener.
.

jeudi 7 juillet 2016

Le management par l'écoute: Orange dialogue


Le dialogue entre parties prenantes est devenu l’une des pierres angulaires de la RSE. Je perçois tout de suite chez les néophytes un grand flottement .Au moins 3 mots inconnus dans la première phrase de cet article. Nathalie Croisé est en train de nous semer! Je vous rassure, L’avantage avec ces sujets c’est qu’ils ramènent tous au bon sens. Donc si je veux vous résumer clairement ce dont je parle, je vous dirai que si nous voulons avancer dans une entreprise-et ailleurs-il vaut mieux écouter tout le monde afin d’apporter des réponses appropriées. CQFD. Ce dialogue entre parties prenantes tient particulièrement à cœur d’Orange qui organisait en ce début d’été une matinée de restitution de ses échanges à travers 6 pays dans le monde sur les thèmes de la Diversité et de l’Egalité professionnelle. Vaste champ de réflexion. Orange a bien changé en 6 ans. Jérôme Barré, le directeur exécutif Ressources Humaines du groupe l’a rappelé en introduction. Le nouveau contrat social a répondu au fort malaise dans l’entreprise-et encore j’édulcore. Et désormais les salariés disent qu’il est mieux de travailler chez Orange qu’ailleurs. Il a fallu un électrochoc comme dans d’autres cas. L'actualité médiatique récente nous le rappelle. Mais désormais le groupe n’a pas peur d’affirmer qu’il veut proposer une expérience digitale mais aussi humaine.

Pour ce dialogue parties prenantes, ce sont plus de 300 salariés qui ont été consultés directement, tout autant par le biais des réseaux sociaux. 6 experts ont aussi fourni leur éclairage. Avec 156 000 salariés dans le monde, la diversité est une problématique forte. Sénégal, Russie, Roumanie, Inde, Jordanie et bientôt Espagne et Egypte, le sujet a été mis au cœur d’ateliers de réflexion. Au Sénégal, diversité rime essentiellement avec personnes en situation de handicap. Sonatel, le « Orange Sénégalais’ a décidé de s’engager à travers la signature d’un accord avec Apave qui accompagne les personnes à mobilité réduite. Il souhaite aussi conclure un protocole avec Handicap International. En France, accepter l’autre dans sa différence nécessite de dépoussiérer les esprits. Ce fut le cas avec l’arrivée d’un stagiaire autiste dans les locaux. Conclusion: des entités non concernées au départ se sont dit que ce serait un atout pour le groupe de travailler avec d’autres stagiaires au même profil. La diversité, c’est aussi faire travailler les jeunes avec les moins jeunes ensemble. Lenjeu économique est de taille car comme le rappelle Jérome Barré, la moyenne d’âge chez Orange est assez élevée. Tout va changer en moins de 10 ans. Plus de la moitié des salariés aura alors moins de 35 ans. Nous nous amusons d’entendre un étudiant en informatique indien estimait qu’une entreprise devrait avoir 20 à 30 % de seniors et donc une majorité de plus jeunes car il faut aussi de l’énergie. Orange réfléchit à de nouvelles méthodes de travail et regarde de près ce que font d’autres grands groupes. Ramon Fernandez directeur général délégué en charge des finances et de la stratégie cite ainsi Accor et son « shadow comex ». Avant un conseil d’administration du géant hotelier, des trentenaires se réunissent pour plancher sur l’ordre du jour et apporter leur éclairage aux quinquas qui prendront des décisions le lendemain. Une initiative du même ordre pourrait bien voir le jour chez l’opérateur. En tous cas les réflexions sont engagées. Toutes les parties prenantes externes attendent une forte exemplarité d’Orange en la matière. Il ne faut pas négliger non plus la réglementation qui pousse l’entreprise à changer. Laurent Vitoux directeur régional Nord Pas de Calais rappelle que le volet 'insertion ' représente 20% de la note dans un appel d’offres. La diversité doit aussi améliorer la compétitivité d’une entreprise.

Autre sujet majeur : l’égalité hommes-femmes. Là encore le groupe progresse mais pourrait faire mieux comme l’admet Jérôme Barré. Les catégories hiérarchiques sont clairement déséquilibrées. Roxane Adle en charge du dossier admet qu’il reste du chemin à faire notamment dans les métiers techniques. Et que dire des différences culturelles ? Quand on est présent dans 28 pays, le démarche ne peut pas être la même partout. Roxane Adle cite ainsi la Jordanie où les hommes et les femmes ont leur rôle précis. Le déplacement professionnel des femmes peut s’avérer un casse-tête : 2 femmes peuvent monter dans une voiture mais pas accompagnées d’un homme . Je préfère ne pas en dire plus, je risquerai de me fâcher. Cet exemple malheureux nous éclaire sur la dimension que doit prendre la démarche d’Orange : elle doit être à la fois globale et locale. « Glocale » pour reprendre les termes de Christine Rabret directrice Egalité des chances du groupe. Enfin des sujets plus sensibles ont été abordés, ils sont qualifiés ici de « signaux faibles » : on y trouve tout de même la religion, l’orientation sexuelle, la maternité et ses conséquences ou encore les diplômes. Orange semble encore très prudent sur ces thématiques. Dans cette matinée et en plein Ramadan j’ai simplement entendu parler du malaise ressenti après les attentats de Charlie Hebdo. Magali Moulin directrice des Ressources Humaines de la direction Orange Centre Est a évoqué une salarié transgenre. En rappelant que finalement tous ces sujets touchaient à la partie la plus intime de chacun d’entre nous et qu’ils étaient donc très sensibles. Elle affirme qu’il s’agit de « vivre ensemble sur des bases purement professionnelles de compétence.»

 
Je sens bien que la parole est moins facile, c’est compréhensible. Il faut saluer la démarche d’Orange car le groupe ose évoquer des sujets parfois tabous. Il ne se fait peut-être pas que des amis. Les plus critiques parleront encore de « cosmétique » Les membres du Comex présents ont –c’est une certitude-témoigné en toute transparence. Le mot de ‘bienveillance’ a été évoqué à plusieurs reprises au cours de la matinée. Je dirai que c’est un signal fort. Tout le monde souhaite que ce dialogue se poursuive et devienne même régulier. J’ai envie de retenir en conclusion cette phrase de l’une des expertes externes invitées à commenter la démarche . Il s’agit de Valérie Petit professeur à l'EDHEC Business School. '"e manager de demain ,c’est celui qui prend en considération l’autre" Si tout le monde pouvait faire de même…

vendredi 1 juillet 2016

Du nouveau dans les assiettes


‘Nous sommes ce que nous mangeons’. Ce n’est pas moi qui le dis mais Charles Kloboukoff, le président-fondateur de Léa Nature. Son entreprise est de plus en plus florissante. Je vais vous en parler d’ailleurs. Car nous souhaitons manger autrement ou du moins savoir ce que nous mangeons. Les sujets commencent à fleurir et en ce début d’été, les conférences de presse se multiplient. Ce n’est sûrement pas un hasard. Il y a l’engagement des entreprises, des associations mais aussi des fondations. Je souhaiterais vous parler d’une d’entre elles en particulier : la Fondation Daniel et Nina Carasso. Une fondation philanthropique familiale sous l’égide de la Fondation de France. Ses missions sont nombreuses : permettre d’expérimenter des solutions pour une agriculture durable, financer la recherche et des projets innovants ou encore jouer un rôle d’influenceur en diffusant des outils et des bonnes pratiques. La tâche est rude. Il suffit de rappeler quelques chiffres. 300 millions d’hectares de terre sont trop dégradés dans le monde pour être cultivés. L’eau devient de plus en plus rare et précieuse : d’ici 2030 le déficit hydrique global devrait atteindre 40%. On compte 800 millions de malnutris chroniques dans le monde. Dans le même temps, l’obésité est une pandémie qui affecte 1 milliard d’individus.
Ce sont tout de même 50% des emplois qui sont pourvus par les systèmes alimentaires.

 


En 5 ans d’existence, la fondation Daniel et Nina Carasso a déjà consacré 5,4 millions d’euros à soutenir 55 projets. Dans le monde mais aussi chez nous. La France doit avancer sur le sujet. Le magazine Cash Investigation consacré aux pesticides a ouvert les consciences. Pour faire bouger les lignes, la Fondation a décidé de soutenir 8 projets dans l’Hexagone destiné à promouvoir des systèmes alimentaires innovants ainsi que l’économie circulaire. On peut citer la ville de Mouans-Sartoux dans les Alpes-Maritimes très engagée dans le développement durable. Elle a ainsi été la première à mettre en place une cantine 100% bio. La Fondation a choisi de soutenir le projet de développement d’une maison de l’agriculture durable qui permettra d’installer d’autres agriculteurs dans la région et de poursuivre la pédagogie. Autre exemple, parisien cette fois-ci , l’Association Zone-AH! Elle valorise les drèches de micro brasserie pour en faire du compost mais aussi de l’alimentation animale. Parmi les objectifs : créer une coopérative pérenne.

La dynamique est bel et bien en marche. Alors que j’assiste à la conférence de la Fondation, je reçois un communiqué enthousiasmant. L’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse ouvre un appel à projets de 500 000 euros qui permettra de financer des projets d’animation pour accompagner des groupes d’agriculteurs vers l’agro-écologie. Une mesure prise dans le cadre du plan Ecophyto II qui vise à réduire de moitié l’utilisation des pesticides d’ici 10 ans. L’agence de l’eau financera pendant un an jusqu’à 50% des frais de personnels chargés de conseiller et de former des groupes d’agriculteurs qui souhaitent réduire significativement l’utilisation de pesticides et s’engager dans l’agro-écologie. Certains esprits plus critiques souligneront à juste titre qu’il est plus facile de soutenir des convaincus que de faire bouger les plus récalcitrants. Les exemples cités en sont une preuve et pourtant je suis de plus en plus persuadée que nous allons regarder au plus près ce qu’il y a dans notre assiette dans les années à venir. Nous mangeons déjà moins de viande et les vidéos dans les abattoirs vont éclairer un peu plus nos choix.


Quand je vois le succès de Léa Nature dont je parlais en début d’article, je suis convaincue. Cette entreprise pionnière avec des marques comme Jardin Bio et Floressance ne cesse de creuser un sillon depuis 20 ans. Ce sont plus de 400 produits labellisés AB et sans huile de palme. 80% de son catalogue est fabriqué en France. JardinBio représente la première croissance du marché avec une hausse de 27,5% en volume. Je suis particulièrement sensible à Karéléa marque dédiée au contrôle des sucres dans l'alimentation. Nous consommons tout de même 4 fois plus de sucre que nécessaire. Dans les produits de la marque, vous ne trouvez aucun édulcorant de synthèse ni édulcorant intense. Ce sont exclusivement des arômes et des colorants naturels. Le secret de fabrique : le maltitol, un substitut du sucre d'origine végétal. Son impact est réduit sur la glycémie et les calories et en prime pas de carie. Quand vous le goûtez, vous ne sentez aucune différence. Cerise sur le gâteau (non sucré) Karéléa est vendu en grande surface. C’est bien la preuve que chacun peut décider de consommer autrement. Si cet article vous a donné faim d’en savoir plus, sachez que la Fondation Daniel et Nina Carasso organise les Premières Rencontres de l’agriculture durable. Ce sera le 8 novembre prochain à l’Institut Pasteur.

 

vendredi 24 juin 2016

Le vent tourne


N'en déplaise aux grincheux de tous poils, la transition énergétique est en marche. La France s'est installée dans un modèle énergétique qui pourrait connaître bientôt ses limites. Nucléaire vs énergies renouvelables: en termes de coûts, la donne change. L'Agence internationale des énergies renouvelables , l’Irena est formelle. Elle vient de dévoiler un rapport plus que parlant. Les coûts de l'éolien terrestre devraient baisser de 26% en 2025 par rapport à 2015, ceux de l'éolien en mer de 35% tandis que ceux de l'énergie solaire photovoltaïque pourraient fondre de 59%. Pendant ce temps les projets se multiplient. C'est ainsi que Quadran, propriétaire exploitant de centrales de production d’énergies renouvelables annonce l’inauguration de la première centrale éolienne avec stockage à l’échelle nationale, sur le site de Petite-Place, dans le département de la Guadeloupe. L'évenement est prévu le 30 juin. C’est un exemple parmi d’autres mais il est emblématique.

Quadran avait déjà installé le premier parc éolien de Marie-Galante, en 1997. Démantelé en 2013 au terme de sa durée d’exploitation, il a été remplacé par la centrale éolienne avec stockage de Petite-Place. 9 éoliennes de 275 kW du constructeur français Vergnet, couplées à une capacité de stockage de l’électricité de 460 kWh par batteries Lithium-Ion du constructeur Saft. Sa puissance : 2,5 MW. Ce sont donc 3300 habitants qui sont ainsi éclairés soit la totalité de la population de la commune de Capesterre-de-Marie-Galante. Cette centrale éolienne est une parfaite alternative aux énergies fossiles. Elle équivaut à la consommation annuelle de 600 tonnes de fuel lourd. Les DOM-TOM sont un territoire privilégié pour une entreprise comme Quadran. Ces îles sont toujours alimentées avec des groupes diesel ou des centrales à charbon.  Un changement s'opère.

La part des énergies renouvelables devrait ainsi atteindre 50% en 2020 en Guadeloupe. Comme on peut le lire sur le site de Quadran, "le groupe a mené plusieurs programmes de recherche sur la prévision de production et le stockage d’énergie. Ce sont deux technologies indispensables pour continuer à développer l’énergie éolienne et solaire dans les zones non interconnectées et s’affranchir de la limite de 30%. Car règlementairement, la puissance des sources « intermittentes » ne doit pas dépasser 30% de la consommation." Là encore il s’agit de bousculer les modèles. L’idée est séduisante pour un esprit rebelle.

 


lundi 20 juin 2016

Se déplacer autrement, un casse-tête pas seulement écolo


En période de grève, c’est là que l’on se rend compte que les transports nous sont bien utiles. Je sais, c’est facile à dire mais ça fait du bien quand on le formule…. Nous avons indéniablement gagné du temps en quelques années. Des distances réduites en termes de temps surtout grâce aux trains mais en parallèle des prix des logements intra-muros qui flambent, au final les habitants deviennent de plus en plus nombreux à la périphérie des villes. Il leur faut bien se déplacer. Et la voiture reste prioritaire. Comment passer d’un transport à un autre ? Voire envisager du co-voiturage en ville ? C’est l’une des problématiques mises en avant la semaine dernière lors de la journée « #Hackons les Bouchons » à Issy-les- Moulineaux dans le cadre de Futur en Seine. La fameuse intermodalité qui a été monopolisée pendant un temps par l’univers des transports publics comme l'a dit avec humour Jean Coldefy, responsable adjoint du service mobilité urbaine de la ville de Lyon. Il s’agit plus que jamais de créer des liens entre les transports publics, la voiture, le vélo voire nos pieds.
 


 

53% des déplacements en voiture se font sur 3 kilomètres. Pour reprendre les explications de Jean Coldefy, la question est quasiment réglée à l'intérieur des villes. Il y a de moins en moins d’espace pour les voitures. Les modes de déplacements propres ont pris le pas. Mais attention les constructeurs n’ont pas dit leur dernier mot. Jean Coldefy est persuadé que les hybrides plus économiques vont remporter dans les années à venir un franc succès. Il va falloir vite réagir. Les applications se multiplient donc pour faciliter la vie des usagers. C’est Optimod'Lyon un GPS multimodal.  Avec deux grandes premières: une à l'échelle mondiale avec le navigateur sur téléphone mobile et l'autre à l'échelle européenne avec la prévision de trafic à une heure en contexte urbain. L'Europe d'ailleurs parlons-en car les initiatives fourmillent . Eurisy qui est une association européenne réunissant des agences spatiales accompagne aussi plus près du sol les autorités publiques. Ainsi Laure Lepastier project administrator d’Eurisy a donné quelques exemples.

 
 
A Prague ,les bus et les trams sont gérés par plusieurs opérateurs. Il faut donc orchestrer l’ensemble. Madrid guide ses habitants vers différents choix de bus. Vienne qui souhaite optimiser le trafic et promouvoir les réseaux urbains a décidé de mettre en place des capteurs GPS sur les taxis. La ville de Brême promeut en particulier le vélo. Bref l’Europe est très connectée. La France n’est pas en reste. Yann Hervouet PDG d’Instant System, expert indépendant de la mobilité intermodale était là pour en témoigner. Il applique le principe du GPS automobile aux différents moyens de transport et a donc mis au point une application qui intègre les avances (on y croit) et les retards pour trouver le système le plus performant. Sa principale mission : favoriser le co-voiturage très complémentaire des transports en commun dans le dernier kilomètre. Il cite ainsi un exemple : l’agglomération de Bordeaux. De Mérignac à Pessac, il faut environ 1h20 en transports. Pourquoi certains étudiants ou salariés partant de Mérignac ne prendraient-ils pas une voiture jusqu’à Talence pour finir en transports en commun ? De quoi gagner du temps et créer du lien.

Là où le bât blesse en termes de co-voiturage c’est – on y revient- la place de la voiture dans la ville. Pourquoi ne pas envisager de créer des voies réservées ? Les usagers y seraient très favorables selon Jean Coldefy. Mais là encore contraindre ou culpabiliser ne sert à rien. Par ailleurs il ne faut se faire aucune illusion sur les bonnes intentions de nos concitoyens. Cristina Pronello professeur à l’université de Turin qui a mené une étude Opti Cities sur plusieurs applis le souligne avec humour : « l’environnement c'est magnifique sur le papier et quand on en parle au dîner mais peu de gens décident de s'engager vraiment . » Finalement ce sont ceux qui estiment que la technologie peut simplifier leur vie qui seront les meilleurs porte-paroles. Mais là encore il va falloir changer les habitudes et les modèles. La ville de demain se construit avant tout pas à pas...

vendredi 3 juin 2016

Cette absence vaut bien un fromage


Je tiens déjà à rassurer mes fans (ils sont 2 au moins, enfin je le suppose). Je suis moins présente sur ce blog que j’aime pour une bonne cause: je développe actuellement un projet de média très innovant, ce qui me prend du temps. J’ai aussi la grande chance d’être sollicitée pour mon expertise. Ce qui m’occupe là encore. Tout cela pour vous dire que je ne vais pas vous parler sans raison de mon péché mignon : le fromage. Figurez-vous que grâce à Carrefour j’ai découvert que je ne connaissais pas tout sur le lait et la façon de fabriquer un camembert. Pourquoi Carrefour? Parce que j ai eu l'honneur d'être membre du jury des Trophées PME Carrefour. Ces prix récompensent des PME engagées et pas seulement les fournisseurs du groupe ce qui est plus que louable. Les échanges entre membres du jury externes à Carrefour ont été denses. Trois catégories ont été mises à l’honneur : les circuits courts, la préservation de la biodiversité et l’antigaspi.

 
J’ai ainsi découvert, je l'avoue humblement, l’initiative de la Fromagerie Gillot spécialiste de pâte molle normande . Une production d’AOP camembert de Normandie et Pont L'Evêque . J'en salive derrière mon écran. Dans ce domaine, la collecte de lait n’est pas linéaire. Il peut y voir des pics de vente et dans le même temps les produits nécessitent un lait de qualité bactériologique irréprochable. autant dire qu'il y a de la déperdition. Actuellement c’est tout de même plus de la moitié du lait collecté qui ne peut être valorisée en lait AOP. Le lait est donc déclassé pour être transformé en poudres de laits. Pour évacuer l’eau, les dépenses énergétiques sont conséquentes. La Fromagerie Gillot a décidé de changer ses méthodes pour préserver le lait. De nouveaux produits ont été lancés pour créer de la valeur ajoutée. Au final tout un panel de produits hors lait cru ( lait frais micro filtré, camembert bio pasteurisé, camembert au four , camembert au barbecue... ). Le groupe a investi dans 8 nouveaux tanks à réception afin de mieux trier et valoriser le lait. Les éleveurs sont accompagnés afin de les encourager à toujours améliorer la qualité du lait.

 
Les résultats sont plus que parlants. Depuis octobre 2015,  aucun lot de fromage n’a été détruit pour des raisons bactériologiques. Le taux de valorisation du lait AOP ne cesse de progresser : il atteignait 42% en 2010 puis 50% en 2015. L’objectif pour 2017 est d’atteindre 60% . Enfin et c’est loin d’être négligeable : les revenus des éleveurs s’en trouvent améliorés. Avec juste quelques idées plein de bon sens. Ne plus jeter ou dégrader ce qui reste mais lui donner une valeur. Franchement je ne vais pas regarder mon fromage de la même façon désormais. C'était donc ma parenthèse "fromage". Parce que là encore, j'ai découvert le temps d'un jury de belles énergies positives. Promis , je vous reviens vite ! Avec de bonnes nouvelles. Il est temps que mon projet prenne vie.