mercredi 18 juillet 2018

Tookki: voyageons responsables!




Je suis incorrigible. Il y a une quinzaine de jours, je vous disais que je quittais ce blog pour l’été mais je reviens beaucoup plus tôt que prévu très enthousiaste. Pas parce que la France est championne du monde de foot (bien que ce soit fort réjouissant)mais parce que j’ai envie de vous parler de tourisme responsable. Cela tombe à pic un 18 juillet. Et pour vous parler tout particulièrement de Tookki que ses fondateurs définissent comme  « le guide du routard 3.0 du tourisme responsable ». 
Est-ce que vous songez à votre empreinte carbone en ce moment sur les plages ou ailleurs? Je sais que la question peut surprendre. 87% des voyageurs internationaux disent en tous cas vouloir limiter leur impact sur l’environnement selon une étude Booking d’avril dernier mais seuls 39% disent arriver à le faire en creusant des pistes. Tookki va leur faciliter la vie. Cette application mobile très simple et intuitive vous guide dans vos choix…en ville. C’est en effet la volonté des 3 fondateurs,Julie, Karim et Fabien de valoriser le tourisme durable urbain. « Ce n’est pas ce qui vient en premier à l’esprit des gens. Difficile d’associer vert et ville mais pourtant il existe des lieux qui répondent à ces attentes » explique Fabien Vermot.

Hôtels, restaurants, activités, shopping et enfin transports : en un clic, vous découvrez les offres éco-responsables. A Paris soyons clairs, il reste encore fort à faire. Tookki a recensé une dizaine d’hôtels éco-responsables mais ce sont déjà pas moins de 300 lieux qui ont attiré son attention. Et les fondateurs ne sont qu’au début de leur recherche. Le site a vu le jour il y a un mois. Il dénombre déjà 3 ou 4 téléchargements par jour et 300 followers sur Facebook. Sa cible : les 25-35 ans, très connectés et avec des valeurs éthiques. 
Tookki n’est pas le seul sur le marché mais Fabien Vermot met en avant son sérieux : « nous validons tous les lieux et nous rédigeons nous-mêmes les commentaires ». Vous pouvez les lire sur le blog. Six critères de sélection ont été retenus : le local, le bio, la démarche éco-responsable, la démarche solidaire, le commerce équitable et enfin la mise en avant de la vie culturelle. Vous découvrez en toute transparence les critères retenus pour chaque lieu.

Les fondateurs se sont lancés avec des convictions sur fonds propre et sont en train d’affiner leur modèle économique. Ils privilégient pour le moment la piste d’une commission de 10% sur les réservations et d’un abonnement très raisonnable pour les professionnels mais tout reste encore à définir. Leur priorité : gagner de nouveaux utilisateurs. Pour envisager un déploiement plus large. Le site est centré sur Paris mais il commence à recevoir des suggestions de followers sur d’autres villes de France. Et pourquoi ne pas envisager Berlin, Londres ou encore Madrid ? Les touristes sont les premières cibles mais les habitants d’une ville souhaitent aussi être éclairés sur des offres responsables. D’ailleurs des Parisiens sont amateurs de Tookki.  
Dans mon euphorie, j’oubliais presque un détail. Je suis certaine que depuis le début de votre lecture, ce nom Tookki vous intrigue. Il signifie « voyage » en wolof. Un écho du Sénégal. Ce qui ne me laisse pas indifférente, je le reconnais. 
Là-bas ou ici, l’essentiel est bien de savoir ce que l’on fait quand on voyage. Bel été à vous toutes et tous 😊

jeudi 5 juillet 2018

La transition écologique, parfois, ça me mine


Mon titre est plus que douteux, vous allez vite comprendre pourquoi mais j’ai des circonstances atténuantes : plus je me plonge dans les sujets liés à la transition écologique, plus je doute.
J’ai bien conscience que ce n’est pas très engageant pour lire mon nouvel article. Qui s’annonce comme le dernier avant la longue pause estivale. Je me sens un peu comme cet ours polaire…en apnée :)

Comme que je n’ai peur de rien, je vais aller jusqu’au bout de ma pensée. Je vais même me glisser dans la peau d’un chercheur en espérant me rendre compréhensible.

Rassurez-vous ! Je reste très saine d’esprit malgré quelques mois de rude labeur. C’est tout simplement une matinée que j’ai passé à Mines ParisTech qui m’inspire cette réflexion digne d’une tragédie de Shakespeare.

J’ai en effet découvert que cette école était très engagée en termes de transition énergétique. Elle développe toute une série de programmes et dans le même temps on sent qu'il reste tellement à faire. Je vous préviens tout de suite, le sujet est un peu pointu mais vous avez plus d’une ressource pour suivre, j’en suis convaincue.





Vincent Laflèche, directeur de Mines ParisTech précise donc que « 50% de la recherche est tournée vers la transition écologique et en particulier l’énergie. » En quelques chiffres cette école, ce sont 180 ingénieurs civils diplômés par an, plus de 30 millions d’euros de contrats de recherche et 18 centres de recherches en pointe dans leur domaine. Et 2 Prix Nobel (il faut tout de même le dire) : George Charpak et Maurice Allais. « Nous formons des chercheurs avec un esprit d’entrepreneurs ». L’école se concentre donc sur les défis de la transition écologique. Il serait bien trop long de passer en revue tout le travail accompli.

Nadia Maizi directrice du CMA, centre de Mathématiques Appliquées a retenu mon attention. Et pourtant je ne suis pas un (une?) cador en maths.
Elle travaille notamment sur la prospective des enjeux climatiques avec le déploiement dans le cadre d’une chaire de modèles d’optimisation dédiés à la planification long terme. Elle est donc en lien avec les experts du GIEC. En clair, il s’agit de voir ce que peuvent donner différents scénariis de mix énergétique. 

Elle mène également des travaux en collaboration avec des industriels, en particulier Schneider Electric sur le scénario 100% renouvelables à l’horizon 2050 ou contribue à la décision publique avec des travaux sur la valeur tutélaire du carbone ou la sortie du nucléaire. Vaste débat alors que l’on attend la Programmation Pluriannuelle de l’énergie, la fameuse PPE. Mais bon je sens que je vais vous perdre alors je repars dans du concret pour vous parler de matériaux. « Ils jouent un rôle très important » nous rappelle Vincent Laflèche.





Là encore, des cerveaux se penchent sur l’optimisation de ces matériaux.
Nathalie Bozzolo professeur au CEMEF, le Centre de mise en forme des matériaux à Sophia Antipolis explique que la métallurgie accompagne toutes les grandes mutations technologiques.

C’est ainsi que la chaire industrielle ANR-Safran Opale vise à l’optimisation des propriétés des matériaux que l’on appelle superalliages. Ils sont employés pour la fabrication de pièces de moteurs d’avion.
Dans les faits, ces moteurs ont de meilleures performances lorsque le générateur de gaz fonctionne à une température très élevée.

Le secteur cherche donc à développer des alliages nouveaux ou des techniques de mise en œuvre qui permettent d’optimiser les performances mécaniques dans ce que l’on appelle les ambiances agressives. L’augmentation de la température de fonctionnement des moteurs permet un meilleur rendement énergétique. Nous sommes dans le cœur de notre sujet.

Tout se joue au niveau de la microstructure des matériaux, à savoir ce qui se passe à l’échelle microscopique. Pouvoir voir au plus près comment tous ces petits cristaux peuvent réagir quand on les transforme. C’est tout le travail des chercheurs.  Ces techniques peuvent servir aussi à la fabrication de caloducs pour les centrales solaires thermiques. Il s’agit des éléments conducteurs de chaleur.
Mines ParisTech entre dans l’ère de la métallurgie numérique et développe des outils de simulation numérique pour aider les entreprises à mieux comprendre comment le matériau réagit aux opérations de mise en forme.

En écoutant Nathalie Bozzolo, je ne peux m’empêcher de penser au livre de Guillaume Pitron « La guerre des métaux rares, la face cachée de la transition énergétique et numérique » aux Editions les Liens qui libèrent.


Et son interview dans Techniques de l’Ingénieur : « Pour la même production d’énergie, les technologies utilisées aujourd’hui consomment davantage de ressources que les technologies précédentes. Plus nous irons vers les technologies vertes, plus nous aurons besoin de ressources. La transition énergétique veut prôner la sobriété, mais nécessite l’inverse pour être rendue possible. En clair :  elle nécessite davantage de ressources et c’est un paradoxe. Aujourd’hui, on ne recycle que 1 % des terres rares mais c’est bien 100 % de tous les métaux rares qu’il faut recycler. Toutefois, même si l’on recyclait l’ensemble des métaux utilisés aujourd’hui, il faudrait toujours aller en chercher plus, c’est inévitable."



Je ne dirai pas que Mines ParisTech n'a pas conscience de l’importance du sujet mais l’école en est au début de la réflexion. Comme beaucoup.
Nathalie Bozzolo parle de travaux sur la durabilité des matériaux. Ludovic Molliex de la direction Matériaux&Procédés chez Safran partenaire de l’école évoque la question dans un dossier fourni sur les innovations. « On fait appel à des matières nobles dans la production des superalliages avec des éléments d’addition qui sont parfois rares ou difficiles à traiter. Un travail de fond a commencé autour de la recyclabilité des matériaux et leur empreinte carbone…Dans le futur ce sera un enjeu fort de modéliser tout ce qui est lié à l’analyse du cycle de vie de nos matériels et le matériau est un contributeur dans le cycle de vie. ».





Nadia Maizi souligne d’ailleurs que les scénarios de prospective s’appuient sur des analyses de cycle de vie. Pour ceux que j’aurai perdu entre temps (et je peux comprendre) «  L'analyse du cycle de vie ou ACV est une méthode d'évaluation normalisée (ISO 14040 et ISO 14044) permettant de réaliser un bilan environnemental multicritère et multi-étape d'un système (produit, service, entreprise ou procédé sur l'ensemble de son cycle de vie." Je viens de vous donner la définition officielle. Je ne sais pas si cela vous aide. En clair, quand vous avez une voiture entre les mains, vous ne regardez pas seulement ce qu'elle va coûter en essence, son taux de pollution et son usure mais vous analysez tout le processus de fabrication et ce qu'elle va devenir une fois que vous ne serez plus au volant. Et ce n'est pas simple. Je vous défie d'ailleurs de comparer électrique et diesel. 


Sur le sujet de la recyclabilité, je ne jetterai donc pas la pierre à Mines ParisTech parce que je n’ai rien d’un chercheur. Je vois simplement que la réflexion progresse et que l’école cherche sa place dans un écosystème. Cette matinée a encore ouvert ma réflexion mais le chemin semble long.




Bref, plus je vous parle de ces sujets et plus je doute. J’y reviens. Je crains que nous ne nous perdions dans des concepts. Je réalise à quel point il est complexe d’expliquer les tenants et les aboutissements d’une stratégie environnementale. Nous agissons tout en vivant cette mutation. 
Rien ne dit que ce que nous faisons aujourd’hui sera totalement bénéfique. Rien n’est blanc ou noir en matière de développement durable. Et pourtant le dérèglement climatique se constate régulièrement. Cet été nous le rappelle. Autant de pluie en un quart d'heure qu'en 3 semaines sur la Dordogne. Certains diront que les catastrophes naturelles se sont toujours produites. C'est indéniable mais ces phénomènes sont de plus en plus fréquents.
Alors je vais faire une pause pour revenir avec des antennes encore plus aiguisées. En espérant vous faire comprendre à quel point s’impliquer est majeur. Même si c’est une goutte d’eau. Bel été à tous. 
Profitez avant qu’il ne fasse trop chaud 😉  


mardi 3 juillet 2018

Danone : mission 100% agriculture régénératrice




Pour vivre heureux, vivons cachés. Quand il s’agit de développement durable, Danone préfère agir plutôt que de s’afficher ostensiblement. 
Mais l’entreprise sait aussi à quel point il est important de montrer la voie. Le groupe n’hésite pas à reconnaître qu’il n’est pas parfait. Il vaut mieux être prudent mais qui est parfait? 
Il s’engage simplement à réfléchir un peu plus chaque jour à ce qu’il fait et surtout comment il doit faire. Work in progress.

Il faut dire qu'il a matière avec 4 domaines d’activités phares : les produits laitiers, un secteur en décroissance sur lequel il faut convaincre et innover en permanence.
Il y a les eaux minérales naturelles, Evian, Volvic, Badoit et La Salvetat qui se portent plutôt bien avec l’arrivée des eaux minérales aromatisées.
Ajoutons-y l’alimentation infantile avec Laboratoires Gallia et Blédina et une cible de jeunes parents de plus en plus tournés vers le bio. Enfin un secteur moins connu, la nutrition médicale qui s’adresse aux personnes âgées et aux enfants malades.





Danone doit donc se réinventer pour séduire les consommateurs mais aussi suivre son ADN et ses engagements environnementaux. Le 25 octobre 1972, Antoine Riboud, PDG de BSN avant sa fusion avec Gervais-Danone, prononçait à Marseille un discours sans précédent. Il proposait de « réduire les inégalités excessives en matière de conditions de vie et de travail » et « de trouver les valeurs qui amélioreront la qualité de la vie en disciplinant la croissance » Emmanuel Faber actuel PDG de Danone reprenait en avril le flambeau. Il présentait son projet « Une personne, une voix, une action » Son ambition : faire participer les 100 000 salariés du groupe agroalimentaire aux choix stratégiques à l’horizon 2030.

« Nous allons plus loin avec une vision de long terme à l’horizon 2030 autour d’objectifs stratégiques reliés à ceux du développement durable de l'Organisation des Nations Unies, auxquels nous voulons associer tous les salariés de Danone dans le monde. » 


En plein projet de loi PACTE « plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises » cet engagement est fort mais ce n’est pas le sujet dont je vais vous parler. 
Il me faudrait d’ailleurs plusieurs articles sur ce blog pour passer en revue tous les engagements de Danone.

En quelques lignes, le groupe mise sur la transparence en expliquant un peu mieux ce qu’il y a dans ses recettes, l’amélioration de l’emballage et notamment le recyclage du plastique. Il souhaite également davantage de bio.
6 marques emblématiques de l’entreprise, Blédina, Danone, Danonino, Evian, Volvic et Alpro lancent cette année des gammes bio. Je peux citer« Les Récoltes Bio de Blédina », une nouvelle gamme bio pour les bébés. Pour 2020, Danone s’engage à proposer du bio sur 100 % de ses produits enfants. Il souhaite prendre la place de leader de l’alimentation infantile bio.




Danone milite par ailleurs pour un nouveau modèle agricole durable : l’agriculture régénératrice. Je voudrais m’y attarder parce que je suis certaine que cet adjectif vous parle mais que vous avez bien du mal à saisir tous les tenants et les aboutissements. Je vous rassure, c’était aussi mon cas avant de creuser le sujet.

Préserver les sols, c’est tout l'enjeu de cette agriculture parce que malheureusement cela ne coule pas de source.
Les pesticides sont l’un des aspects du problème. Il y en a un autre qui peut davantage nous échapper : les agriculteurs labourent régulièrement et ne font pas du bien au sol. Retourner la terre l’appauvrit.
C'est ce qu'affirme Sarah Singla agricultrice en Aveyron et fondatrice de Hum’s. Une jeune femme pétillante qui a pris son bâton de pèlerin pour former ses confrères. Et en vidéo elle est très convaincante. 


Pour elle, les agriculteurs doivent développer le semis direct sous couvert végétal. Il s'agit d'une technique agricole qui consiste à implanter une culture directement dans un couvert végétal sans avoir préalablement travaillé le sol. Sarah Singla m'a d'ailleurs montré une photo de son champ au moment des semis. Un vrai bazar. Des végétaux partout. L'agriculteur doit donc oublier les outils métalliques pour privilégier une autre méthode.
Sarah Singla n’a pas la langue dans sa poche, pour elle, les récentes inondations sont certes liées à l’urbanisation mais le trop grand travail de la terre n’a rien arrangé. A force d’être retourné, le sol n’absorbe plus l’eau.
Dans une interview, Sarah Singla reprenait une phrase de l’américain David Montgomery, « l’érosion des sols c’est l’érosion des civilisations ».
« A chaque fois qu’une civilisation oublie son sol, elle finit par disparaître. Le sol est le fondement de tout – sans sol, il n’y a pas d’agriculture et sans agriculture, il n’y a pas de civilisation. » Quand on sait que cette technique ancestrale remonte aux Egyptiens, on comprend mieux les enjeux.

Cette agriculture de conservation ou régénératrice est donc majeure aux yeux de Danone qui ne doit pas oublier son business. Le groupe s’est fixé une grande ambition: en 2025, 100 % des produits cultivés en France devront être issus d’une agriculture régénératrice. C’est un lourd défi car beaucoup d’agriculteurs restent attachés à un modèle. Comme l’explique Sarah Singla, beaucoup s’accrochent à leur tracteur, quitte à s’endetter pour un nouveau modèle à 400 000 euros.
Danone y croit et rédige son cahier des charges en partenariat avec des ONG et experts référents en la matière. Ce sont 2300 agriculteurs qui travaillent pour la célèbre enseigne.
Pour Emmanuel Faber « la grande limite du système agro-industriel actuel, c’est d’avoir parié entièrement sur la plante en créant des semences de plus plus performantes et en leur ajoutant des intrants de synthèse de façon à booster leur performance. Dans ce système, le sol n’est qu’un support, aujourd’hui épuisé. ». 

Le géant de l’agroalimentaire va s’associer à la plateforme de financement participatif Miimosa pour cofinancer les transitions agro-écologiques des agriculteurs qui les fournissent.  Danone souhaite aussi mobiliser les consommateurs. C’est pourquoi le 21 septembre prochain, 100% des ventes seront totalement dédiées à financer cet accompagnement. Il appellera ce jour le Green Friday. Une journée de chiffre d’affaires, c’est 5 millions d’euros. Une première étape pour changer la donne. N’est-ce pas aussi cela être une entreprise à mission ?

Crédits Photo: Danone et Youtube