jeudi 23 janvier 2020

L'homme sera-t-il sauvé par l'argent???


Ce jeudi 23 janvier, j’ai trouvé le temps de passer quelques heures au Parlement des Entrepreneurs d'Avenir. Et pourtant je n’animais pas. Mais il faut savoir être altruiste et ouvert d’esprit dans ce domaine du développement durable 😉.  Le thème de l’événement pour ses 10 ans: Humanisons le progrès ! Un vrai sujet de philo. Les 2 ne seraient-ils pas antinomiques ? Vous avez 4 heures pour répondre.
Plus les technologies se développent, plus certains disent voir disparaître le « pouvoir » de l'homme. Et si les robots nous supplantaient ? Et que dire d'un monde plus durable avec toujours plus d’exploitation des métaux rares et de gestion désordonnée des ressources ? Enfin je ne vais pas m'appesantir sur le sujet car nous y serions encore demain matin. Je vais vous parler d’argent. 
Précisément comment l’argent sauvera la planète !
Oui vous avez bien lu ...Un constat, une affirmation. Si je puis me permettre, j’aurais plutôt dit comment l’argent sauvera l’humanité. C’est plus fort et plus réel. Sans nous et sans aucun billet de banque, les grands animaux sauvages se portent méga bien.

Bref pas de point d’interrogation dans le titre de ce débat animé par un camarade Jean-Louis Caffier et pourtant je repars avec quelques questions
Ce n’est nullement la faute des intervenants tous très engagés et intéressants mais sommes-nous vraiment sur une voie de changement de modèle ? Pour mettre dans ma poche un ou deux cégétistes 😉, serait-ce la fin du capitalisme ? Rien n’est moins sûr.

Il y a quelques signaux engageants d’évolution du modèle. Anne Catherine Husson-Traoré directrice générale de Novethic rappelle qu’il y a 5 ans l’idée que le changement climatique soit un risque systémique pour la stabilité financière semblait absurde à beaucoup d’experts. Depuis, il y a une matérialisation du risque physique comme les incendies en Australie. Il y a aussi les risques liées aux dépréciations d’actifs. Rappelons que les actifs pétroliers sont une part importante des indices mondiaux .
Stéphane Voisin analyste financier et enseignant à l'Université Paris Dauphine renchérit : « Il y a une prise de conscience sur l’appréhension des risques.
Quand on voit que Daimler annonce des profits warning et que dans le même temps Tesla devient le premier constructeur mondial, on sent un infléchissement de tendance.
Mais en même temps les émissions de CO2 ne cessent d’augmenter
Plus de 80% du mix énergétique dans le monde est toujours d’origine fossile.
L’urgence est donc de contribuer au financement de la transition. Et ce ne sont pas les Etats qui vont le faire. On appelle la finance à régler une partie du problème. »

Et Gonzague de Blignières co-fondateur de RAISE société d'investissement d’ajouter : « on voit naître depuis quelques années des fonds à impact mais c’est une hérésie.
Il faut que tous les investisseurs prennent conscience de cet impact. »
Thomas Lagoarde-Segot Professeur Associé d'Economie et Finance Internationale à KEDGE Business School revient à une réalité : « Les économistes préfèrent parler de monnaie plutôt que d’argent.
Or tous nos outils de pilotage monétaire sont inopérants.
La Banque Mondiale a calculé le coût monétaire des désastres naturels.
Elle estime la perte en termes de consommation à 520 milliards d'euros. Mais l’indicateur monétaire est-il un bon indicateur ?
Il laisse entendre que les coûts seraient temporaires et réversibles et qu’il serait possible de les compenser. 
A bien y réfléchir, on peut valoriser monétairement une forêt pour la raser et construire en lieu et place.
Il ne faut pas croire non plus que les bénéfices des entreprises soient un signe positif.
Pour Julie Walbaum directrice générale de Maisons du Monde, « à long terme tout le monde est d’accord pour dire qu’une entreprise sera rentable si elle est en phase avec sa raison d’être.
Mais à court terme ce n’est pas le même son de cloche ».
Gonzague de Blignières a la formule qui fait mouche: le capitalisme est un mammouth obsédé par le profit et le court-termisme.
Et donc ne vous en déplaise c’est le business as usual. Anne Catherine Husson-Traoré met les pieds dans le plat : "l’exclusion du charbon des portefeuilles est devenu une quasi norme mais les émissions liées au charbon n’ont pas changé pour autant.
Le monde financier est décorrélé de la réalité. Pouvez-vous m’expliquer pourquoi quand on voit le mur on appuie sur l’accélérateur ? »


Ce ne sont donc plus des freins que l’on voit au changement de modèle mais des montagnes difficilement franchissables.
Tous les intervenants s’accordent à dire que la jeune génération va changer la donne car elle aspire à donner du sens. Certes mais vont-ils tous changer? Dans ces conditions pourquoi ne pas générer du profit mais en le distribuant équitablement? Par exemple Nature et Découvertes consacre 10% de ses bénéfices nets à une fondation qu’elle a dédié à l’environnement. Ce sont 13 millions d’euros qui ont été donnés en 25 ans
Il est plus que temps d’agir. C’est pourquoi le Parlement des entrepreneurs d’avenir lance à l'occasion de ses 10 ans un appel pour une finance de progrès social et environnemental
Il engage la finance à faire partie de la solution.
Stéphane Voisin rappelle que nous avons besoin de 100 milliards par an pour financer la transition et pourtant l’argent n’est pas là. Une solution : une refonte du logiciel qui fait tourner la finance 
Pour Thomas Lagoarde-Segot  il faut inventer un nouveau langage commun pour dépasser les indices actuels.
Les ODD, Objectifs Développement Durable fixés par l’ONU sont l’un de ces outils. Car l’économie a toujours été séparée du social et de la nature.
Comme je vous le disais, je me retrouve au bout d’une heure avec plus de questions que de réponses. Une certitude quand même : si d’ici 5 à 10 ans rien ne change nous irons dans le mur. Pas certaine donc que l’homme soit sauvé par l’argent. Un de mes fils m’a d’ailleurs demandé un jour : « Pourquoi a-t-on inventé l’argent, c’était cool le troc ? » Allez-y, trouvez la réponse. Vous avez 4 heures…au moins.




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