mardi 1 mars 2016

L'agriculture écologiquement intensive, la solution?

Je pense qu’il va falloir sérieusement changer de lunettes. Voir les trains qui arrivent et les gens heureux. Naïve me direz-vous ? Peut-être mais les mauvaises nouvelles seront toujours là. Le monde est fait d’incertitudes. Nous perdons un peu de notre insouciance. Alors arrêtons de nous lamenter et cherchons des solutions. Bravo d’ailleurs encore à Mélanie Laurent et Cyril Dion de porter l’espoir avec "Demain" désormais césarisé.
Regardez donc le monde de l’agriculture. En plein salon porte de Versailles, il est nécessaire d’en parler. Pour certains, la situation est dramatique. 600 suicides en 2015. Comme le dit Hubert Garaud agriculteur en Loire-Atlantique et président de la coopérative Terrena, « suivre aveuglément la logique du productivisme s’est révélé mener à l’impasse. ». Il ne faut pas occulter ces drames. Mais il y a peut-être une autre voie. Des agriculteurs ont décidé de proposer des solutions. Vous ne voyez que les vidéos d’abattoirs sordides, vous prenez peur face aux pesticides mais savez-vous que le monde agricole innove pour rendre son métier plus écologique tout en restant productif ? Décidant de prendre le contrepied de l’état d’esprit ambiant, Hubert Garaud a choisi d’écrire à 4 mains avec Maximilien Rouer, consultant fondateur de BeCitizen « Les agriculteurs à la reconquête du monde » chez JC Lattès. 300 pages pour recenser 100 actions et raisons d’espérer. Tous les deux ont décidé d’apporter une lecture positive de l’avenir agricole. Je ne peux qu’adhérer. Ras-le-bol de notre environnement médiatique qui se complait dans le suivisme et le morbide ! Attention à ne pas atteindre certaines limites !

 

Dans un premier lieu, remettons les pendules à l’heure. L’agriculture est un sacré business. Pour résumer, Terrena, ce sont 22 000 agriculteurs et un chiffre d’affaires de 5 milliards d’euros. Il y a un important tissu industriel : connaissez-vous Sodiaal ou encore Vivescia ? Des structures qui n’ont pas à rougir face aux grands noms du CAC 40. Ce monde agricole a donc des atouts mais disons- le, il part de loin. Commençons par ce qui fâche. Maximilien Rouer nous met devant le fait accompli : la France agricole ne nourrit plus les Français . Elle a perdu son autosuffisance alimentaire depuis 15 ans. 40% du poulet est importé, 55% des moutons. Si je vous dis que 60% des champignons de Paris viennent de Chine et 90% des Escargots de Bourgogne viennent de Grèce, il y a de quoi pleurer. Où est le fameux Made in France ? On importe entre 20 et 70% de nos besoins annuels. Et que dire du bio ? Les Français y aspirent mais seule 4% de la surface agricole utile est bio en France. Le bio quand il pleut trop s’avère impossible, paraît-il. Doit-on pour autant déprimer ? Non parce qu’Hubert Garaud apporte un réponse : l’agriculture écologiquement intensive. L’assemblage a de quoi surprendre mais il mérite qu’on s’y attarde. Hubert Garaud estime qu’un agriculteur peut ainsi mieux gagner sa vie. IL faut rappeler qu’actuellement il assure 30% des investissements nécessaires à la production d’un produit fini mais il ne perçoit que 8% des revenus. Il est temps de changer de modèle. C’est ce que montre ce livre.

 

Impossible de passer en revue toutes les bonnes initiatives. Elles viennent d’abord de la capacité d’innover du monde agricole que je souligne une nouvelle fois. Pour reprendre les termes d’Hubert Garaud « le monde agricole est un monde d’entrepreneurs très ouverts au changement ». C’est ainsi que pour réduire le recours aux pesticides, certains ont choisi d’associer deux variétés de colza : 5% d’un colza précoce et 95% plus tardif . Pour quoi faire ? Simplement piéger le scarabée méligèthe que j’ai le grand honneur de vous présenter.


La petite bête va se rassasier des 5%. Il sera ainsi plus facile de la neutraliser pour laisser s’épanouir le reste de la plantation. Futée la guêpe ! L’agriculture c’est aussi « le mariage heureux des vers de terre et du big data ». C’est ainsi que l’appli Tiben@ chez Terrena permet de mesurer le degré de bien-être de l’animal. : près de 90 données sont prises en compte. Et un animal qui se sent bien , ce sont moins d’antibiotiques. Autres axes de développement : les partenariats avec la grande distribution. Elle aussi est régulièrement stigmatisée. C’est tellement plus facile. Elle a pourtant un rôle à jouer et bouge parce que les consommateurs sont plus exigeants.

 

Prenons le temps de parler de ce qui se fait de bien. On peut ainsi citer le programme LU'Harmony de Mondelez, 2000 agriculteurs sont impliqués pour un blé de meilleure qualité. C’est le cas de Système U avec son lait bio. Un partenariat s’est noué avec les embouteilleurs et les coopératives pour réduire les coûts.  Derrière la Filière Qualité Carrefour, on compte 20 000 agriculteurs. Le plus bel exemple vient d’Irlande avec la marque Origin Green. Le pays dénombre 100 000 éleveurs avec peu de vaches qui se nourrissent essentiellement d’herbe. Assez logique finalement. L’Irlande a décidé d’en faire un atout et une marque. Un vrai carton. Et le prix dans tout cela ? Le consommateur aura évidemment son rôle à jouer. Hubert Garaud estime que 5 centimes supplémentaires sur une côte de porc, c’est un gain de 12 centimes pour l’éleveur si le système a évolué dans son sens. Sommes-nous donc prêts à payer un peu plus ? Là aussi les mentalités doivent évoluer. Ne vous étonnez pas de mal manger avec un poulet à 3 euros ! Certains ne peuvent pas s’offrir davantage mais d’autres peuvent faire un choix responsable. Hubert Garaud constate que ce monde agricole tombe malade car il est inadapté mais selon lui en moins de 2 ans, le modèle peut évoluer. Ou du moins faire de nets progrès. Chacun apprenant à travailler en coopération. Revenir au plus près de la terre ne signifie pas être moins rentable. Il avance même un chiffre : « le chiffre d’affaires agricole doit dans les 10 prochaines années passer de 65 à 110 milliards d’euros. ». « L’agriculture écologiquement intensive est une rupture » ajoute -t-il. Je veux bien le croire. Ce métier tout comme d’autres est en mutation. Donc n’ayons pas peur d’évoluer. C’est ce qui nous sauvera…Mais il va falloir se retrousser les manches !

 

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