mardi 19 janvier 2016

La solution est dans la...solution...

Il parait que le lundi 18 janvier est le jour le plus déprimant de l'année. Ouf! Il est passé, me direz-vous mais pourquoi tant de haine? Trop de dépenses pour les fêtes, une balance qui ne nous sourit pas, le manque de soleil, des températures glaciales, des bonnes résolutions balayées. En prime ,cette année ils sont nombreux à s'être invités à un bœuf gigantesque au paradis nous laissant orphelins d'accords de musique qui nous réchauffaient. La goutte d'eau qui fait déborder le vase. Ce 18 janvier est bel et bien le top du Blue Monday. Tout ça pour vous dire que ma petite personne l'a plutôt bien vécu sauf en fin d'après-midi. Comme quoi il y a quelque chose qui ne tourne pas rond au royaume du 18 janvier. Décidée à aller à contre-courant de l'ambiance actuelle, je m'étais plongée dans la matinée dans Demain de Cyril Dion. Le film, je l'ai déjà vu avec grand bonheur mais j'ai voulu approfondir avec le livre publié chez Actes Sud. "Partout dans le monde des solutions existent". Après une lecture sereine, je partais donc le cœur léger à une conférence dans un amphithéâtre du 16ème. Organisée par le Comité 21 et Club FranceDéveloppement.


Là encore il est question de solutions. Le mot de 2015! Il y en avait partout des solutions. Nous attendions tous une réussite de la Cop21 mais surtout entreprises et société civile avaient envie de dire qu'il y a moyen de s'en sortir. Par l'innovation ou par le simple bon sens. Pour revenir à nos moutons, hier soir rue Michel-Ange nous nous posions cette question "Quelles solutions face au changement climatique?" La réponse est apportée dans un livre publié chez CNRS Editions. 60 contributeurs pour 40 articles. Sous la direction de Bettina Laville, Stéphanie Thiébault et Agathe Euzen. Pour être très franche, je n'ai pas encore eu cet ouvrage entre les mains. Mais j'ai écouté attentivement les échanges et les interrogations des contributeurs. D'emblée il faut le reconnaître, l'euphorie Cop21 retombe un peu. Gilles Berhault président du Comité 21 le résume très bien:  "Nous avons un traité, il a évidemment beaucoup de défauts, maintenant il faut aller vite. " De ce 12 décembre 2015 nous pourrions donc dire que les scientifiques ont été entendus par la classe politique. C'est déjà ça. Sauf que le temps file et que la population augmente. Certains estiment que si nous maintenons un rythme semblable à celui des années 2005-2010 nous serons 27 milliards en 2100...Comme nous ne sommes pas prêts de partir sur Mars, une seule solution: changer de modèle. Et c'est bien là que le bât blesse. Bettina Laville conseiller d'Etat et fondatrice du Comité 21 n'y va pas par quatre chemins: "Je ne trouve pas que l'accord de Paris ait mis en avant le moindre prémice de modèle économique". Ainsi les pays en voie de développement pourront avoir le rythme de croissance qu'ils souhaitent à la condition de changer de modèle énergétique et d'avoir une croissance "verte et inclusive". Le système ne change pas pour autant. Et rien sur une société post-énergies fossiles.

 

Au coeur des débats, la croissance. Dominique Méda, philosophe, sociologue, professeur à Paris-Dauphine parle d'une contradiction: "la Cop21 est une validation que notre mode de développement est insoutenable, le progrès de la société se mesurerait à son taux de croissance et on nous dit maintenant que ce n'est pas le cas. Il nous faudrait toujours plus de croissance selon les politiques et de l'autre côté ce développement n'est pas si souhaitable. Que va-t-on faire de notre "vieille croissance"?" Le PIB est toujours la référence par excellence mais il ne mesure pas toutes les activités, il ne tient pas compte des inégalités en terme de production. "Finalement nous pouvons avoir un gros PIB et une planète dévastée. " Tout est dit. Ce délicat équilibre entre croissance et décroissance. Je me souviens de cette phrase de Pierre Rabhi lue quelques heures avant dans le livre Demain: "l'idée de croissance sans fin met en route une humanité insatiable qui au lieu de percevoir la planète comme un véritable miracle, une merveilleuse oasis perdue au milieu d'un grand désert sidéral, dans lequel il fait si bon vivre, la voit comme un gisement de ressources qu'il faut épuiser jusqu'au dernier poisson et au dernier arbre."  J'ai soudain un instant de flottement. Certains veulent y croire toujours comme cet anthropologue Gilles Boëtsch qui est engagé dans le projet de la GrandeMuraille Verte destinée à relier St Louis du Sénégal à Addis Abeba. Un objectif: freiner la désertification. 11 pays du Sahel sont engagés. 8 sont en guerre. Vous me suivez. Et pourtant un espoir au Sénégal avec la mise en place de jardins polyvalents. 300 femmes plantent des fruits et légumes arrosés par un système de goutte à goutte. Ils sont vendus sur les marchés. Pour aider ces femmes et ces hommes à laisser un peu l'élevage intensif de chèvres qui détruisent tout sur leur passage. En même temps, les perturbations climatiques dans le Sahel les avaient contraint à modifier leurs habitudes.

 Restaurer les écosystèmes est donc l'une des clés pour cet anthropologue. Il en est de même dans Demain. Découvrir avec jubilation que des fermes urbaines se déploient autour de Détroit ou encore que certains croient plus que jamais à la permaculture. Une lueur d'espoir mais pour combien de doutes. Rappelons que l'accord de Paris n'est pas encore ratifié. Ce sera pour avril. Par ailleurs la seule date contraignante a été fixée à... 2025. 10 ans c'est court et très long étant donné l'état de la Terre. Nous modifions notre climat 10 fois plus vite que par le passé. Donc voilà ce 18 janvier un  nouveau constat. Il y a urgence et ils sont encore trop peu nombreux, les femmes et les hommes qui agissent. Je voudrais pourtant garder un peu d'optimisme et finir sur cette question de Dominique Méda:  "Est ce qu'on peut avoir des sociétés sans croissance et néanmoins prospères ?" C'est faisable nous dit-elle. "Avec une reconversion écologique faite de façon intelligente. On pourrait résoudre aussi la question sociale du mal- être au travail." De bonnes intentions peut-être encore et toujours aux yeux de certains. Etrange cette sensation que nous avons les clés mais sans pouvoir les utiliser. Et pourtant...Finalement le 18 janvier c'est peut-être la date idéale pour vaincre la malédiction...

 

 

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