lundi 27 février 2017

Libérons-nous de la peur!



Je n’aurai qu’une chose à vous dire aujourd’hui : si les Français sont tous dépressifs et névrosés, c’est qu’ils sont sado-masos ! Vous vous demandez bien ce qui m’arrive soudain avec le titre de ce nouveau post qui frôle le sectarisme. Je suis simplement revenue changer d’une rencontre avec Didier Toussaint lors d’un Mercredi Singulier organisé dans le 18ème arrondissement par les Studios Singuliers, espace de coworking fort sympathique où je suis venue travailler de temps en temps. Camille, Cyril, Basile ses fondateurs ont la bonne idée de nous inviter à la réflexion à l’heure du déjeuner. Le 8 février la rencontre était donc autour de ce thème « La France et le sel de la peur’. Pour nous en parler, Didier Toussaint associé fondateur de DIT, une société de conseil spécialisée dans le changement par l’analyse et l’inconscient de l’entreprise. Il vient d’écrire un livre qui sera bientôt publié, nous lui souhaitons, sur le Mal Français dont on parle tant. Il y a évidemment une réalité économique qu’il rappelle à travers les chiffres du chômage : officiellement un taux de chômage de 9,5% , un déficit de 48 milliards d’euros, une dette qui se creuse. Bref rien de reluisant. Ajoutez à cela le moral des troupes : il révèle ainsi un chiffre inquiétant donné par l’UNICEF. 43% des adolescents de plus de 15 ans seraient en souffrance en France. Le taux de suicide est élevé : plus de 16 personnes sur 100 000 habitants. Sans parler des anxiolytiques.




Je vous ai donc plombé le moral pour le reste de la journée. Moi qui d’ordinaire vous parle de démarches positives , me voilà tombée bien bas. Mais pour être optimiste ,il faut savoir de ce dont on parle. Figurez-vous que la Boétie disait déjà à la fin du 16ème siècle : « Pauvres et misérables Français, nation opiniâtre en tout mal. » Au 20ème siècle, la prise de conscience est de plus en plus forte . En 1976, Alain Peyrefitte évoquait le « Mal Français ». En 1964, Michel Crozier faisait figure de pionnier avec le « Phénomène bureaucratique ». Michel Crozier démontait les mécanismes de centralisation et de multiplication des règles qui débouchent sur la formation de cercles vicieux bureaucratiques. Il dévoilait les rigidités et la résistance au changement qui continuent d’apparaître comme l’un des traits culturels français les plus saillants. 50 ans après rien n'a chanfé. Didier Toussaint prend ainsi l’exemple de Renault créé à la fin du 19ème siècle. Louis Renault en prend les commandes de façon autoritaire. La presse le surnomme « le Saigneur de Billancourt ». Et finalement son gendre François Le Hideux le décrit très bien en soulignant sa peur de la foule. Nous y voyons ainsi plus clair : le patron a peur et les salariés aussi ont peur. Michel Crozier va plus loin en créant le concept de « communauté délinquante ». Il n'y a visiblement du collectif en France qu’à partir du moment où il y a projet de délinquance, autrement dit un projet qui va « contre le chef ». Nous fonctionnons sur des rapports de rivalité et des mécanismes de contestation de l’autorité. De là apparaît la délinquance institutionnelle. Si on observe les règles à la lettre tout est bloqué. Il faut donc enfreindre ses règles pour aboutir à un résultat. Toute allusion à des affaires en cours serait évidemment fortuite.



Finalement toute la genèse tient à notre histoire. Les Français font tout à l’envers. Là où les Allemands montrent leurs victoires, les Français montrent leurs défaites. Et les petits écoliers de garder en mémoire le dessin de Vercingétorix rendant les armes à César. La soumission est en nous. Elle se reproduit à la Révolution. Didier Toussaint met en avant une figure phare, Sade. (J’en reviens au fameux sadisme). L’homme se plait à dire qu’il aime abjurer Dieu quand il bande. Mais comme Dieu n’existe pas, il est contraint de le « réédéifier ». En résumé Sade aurait pu dire « je détruis tout pour pouvoir jouir de ma liberté mais pour en jouir encore plus il faut que je crée cette autorité. » Robespierre a trouvé un modèle en Sade. Il n'a cessé de l'affirmer. Et que dire de Jean-Jacques Rousseau qui vante le plaisir que lui procure la fessée. Le parfait symbole du masochisme, repris en exemple par Freud. Donc tout serait dit. Nous sommes un peuple qui a besoin d’être soumis pour détruire et ensuite reconstruire. Mais le traumatisme perdure.



Avec la Révolution, l’autorité n’a finalement pas été abolie. Didier Toussaint nous invite à découvrir l’ouvrage la Révolution écrit par Edgar Quinet (qui n’est pas qu’une station de métro). En France, nous finissons par créer d’autres pouvoirs au sein même du pouvoir. Je parle d’ailleurs souvent du phénomène des petits chefs. Poussés par les objectifs de rentabilité, ils deviennent même pervers. Et les salariés sont en souffrance. Pourtant je le répète, beaucoup de nos concitoyens ont une belle énergie, proposent des idées neuves, ont envie de changer la donne. Parfois ils se heurtent à des schémas archaïques. Je ne vois qu’une solution, sortir de notre sado-masochisme ancestral et retrouver notre liberté sans tabou. Mais avec les règles qui conviennent.



Le chemin sera long, il faut l’admettre. Didier Toussaint a le mérite de libérer la parole sur le sujet. A l’approche de la présidentielle il est bon aussi de rappeler qu’alimenter les peurs ne sert qu’à basculer dans les extrêmes. Notre plus grand défaut est d’être tombé dans le piège de croire au pouvoir absolu. Le tyran n’est pas toujours celui auquel on pense. Je veux croire que la jeune génération aura un autre regard et pourra nous mener vers un cercle plus vertueux.

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